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saboter ma présence twitter

18.11.2022

Twitter est en train de fournir le spectacle de son effondrement beaucoup plus rapidement que prévu. Personellement, je misais sur une échelle de temps de 3 à 6 mois.

J'en profite pour m'échapper définitevement mais aussi discrètement. Je pense à tous ceux qui vont en profiter pour simplement se sevrer des réseaux sociaux et de retrouver leur capacité d'attention. Il y a un texte sur comment disparaître dont je n'arrive, ironiquement, plus à retrouver la trace. Si mon compte est encore ouvert, c'est principalement pour assister à la fin de ce réseau qui aura occuper plus 15 ans de ma vie et ne pas rater les annonces de déménagement avec nouvelle adresse. Quand cela arrive, je me désabonne faisant ainsi un ménage progressif. J'ai en parallèle effacé mes 3200 tweets et 3200 likes les plus récents et je ferai un nuke complet dans les jours qui viennent. Je ne sais pas trop quoi penser et ressentir par rapport aux gens qui attendent le dernier moment pour arrêter de s'en servir comme espace de parole et de conviction. En exagérant, j'ai l'impression qu'il y a une forme de chantage affectif qui me donne une boussole sur les comptes dont je peux me désabonner sans attendre d'alternative. Une forme d'inattention à l'autre qui se transforme en manque de soin. Une fermeture à l'interaction dont la source est certainement un effet du contexte. Est-ce que j'ai vraiment envie de retrouver ce genre de mots de l'autre côté ? En attendant, donc, je coupe cet accord tacite en espérant que cela montre un signe d'attention de ma part : je suis content que la personne se soit échappée, je peux enlever sereinement un lien sachant que je la retrouverai ailleurs et je libère également la personne de la possession symbolique du lien par Twitter. Mon compte étant également vide et passé en privé, je veux aussi signifier qu'il n'est plus nécessaire de faire attention à moi ici. La relation ne compte plus ici mais là-bas.

Les données qui seront exploités sont en égale mesure de la vie qu'on a mis sur ce site. Cependant qu'il y a un truc paradoxal car le plus critique sont les détails de certains comptes (les militants, les journalistes, les personnes publiques) mais également que pour la majorité des données, le mal est déjà fait. Les données nettoyées de toute forme de nominalisation permettent déjà de nourrir des algorithmes de ciblage et d'extraction de patterns de comportements. La partie non-anonymisée n'a déjà plus de valeur économique, c'est un résidu que l'on peut effacer sans que cela pose de problème aux dispositifs de surveillance. Peut-on par contre présumer de la bienveillance ou de la malveillance des prochains propriétaires/owner de cet ensemble socio-technique ? Tout effacer peut donc apparaître comme un geste relativement vain mais qui pourra quand même avoir un effet de ralentissement, de salissage ou de minimisation de l'empreinte numérique. Provoquer une perte de temps mineure qui s'accumulera avec une autre en espérant la chose la moins exploitable possible càd pas assez rentable avec un calcul coût/bénéfice.

J'essaie de rester calme mais j'ai quand même l'impression qu'il y a une forme d'urgence. Cela me semble toujours plus souhaitable de pouvoir partir avec précaution sur ce l'on laisse derrière soi et celleux qu'on aimerait pouvoir retrouver avant que cela ressemble à une évacuation précipitée. Quand passera-t-on de l'un à l'autre ?