Le ministère des contes publics (Sandra Lucbert)
03.02.2022
Le ministère des contes publics de Sandra Lucbert est un livre aussi court que violent et puissant. Je n’ai rarement lu de déconstruction aussi efficace du jeu de langage entre politique et néo-libéralisme. Je recommande vivement et prête mon exemplaire avec plaisir à qui veut.
Gramsci et la séquence de Die donnent raison à Pascal : un État ne se soutient pas uniquement par l'appareil de force, mais l'assentiment passif des dominés. Les gendarmes n’étaient pas nécessaires - la piperie, si. La nuance est d'importance et Gramsci lui donne son concept : l’hégémonie – l'ensemble d’opérateurs de consentement par où une domination devient une direction. Partagée par tous, parlée par tous, elle impose le normal. Elle semble avoir toujours été et devoir toujours être. Elle se prétend de l'intérêt de tous ; en réalité, ne bénéficie qu'à certains.
Un ordre social ne dure qu'à proportion de c'est ainsi. C'est ainsi : il y a des riches et des pauvres, des qui peuvent étudier – d'autres pas ; il y a des gens qui vont se « confiner » au plein air de l'île de Ré – d'autres qui étouffent à cinq dans un deux-pièces à Saint-Denis ; des qu'on ne contrôle pas – d'autres qu'on tabasse à mort.